Noël, que du bonheur (Partie 2)

Noël, que du bonheur (Partie 2)

 

Tandis qu’elle s’enfuit, il la chope pour la deuxième fois par le col et fait la seule chose à faire dans sa situation : il pose ses lèvres rêches sur la peau de la jeune fille et enfonce ses canines pointues dans une veine bleue de son cou tendre.

 

Elle hurle de douleur, puis se tait, sonnée. Le poison sécrété par les crocs de John lui ôtant toute volonté.

Nathan se précipite pour écarter le vampire de sa (presque ?) petite amie.

 

Ilona ne voit plus rien, juste une lumière blanche qui l’aveugle. Pitié, pas le paradis… mourir vierge, franchement, quelle honte !

-Ilona, Ilona ? Est-ce que tu vas bien ?

 

Elle ouvre les yeux pour découvrir le visage couvert de tatouages de Nathan. Il a posé sa tête sur ses genoux et lui caresse les cheveux.

Sa main tremble.

– Je… qu’est-ce qu’il s’est passé ?

– Quand j’ai séparé John de ton cou, il est tombé au sol, t’entraînant dans la chute. Tu t’es cogné la tête et nous l’avons empalé. Il est tombé en poussière.

 

Il la soulève comme une poupée de chiffon. (Waaaah ! Il est fort !)

– Ouais ! On l’a enfin eu ! fait la voix de Ursula.

– C’était un peu trop rapide tout ça. Et les vampires se dessèchent quand on les empale, ils ne tombent jamais en poussière.

La silhouette encapuchonnée de la louve hausse les épaules.

– Son esprit rusé légendaire l’aura abandonné. Bon, tu t’occupes d’elle ? À mon avis, tu ferais mieux de la tuer tout de suite pour qu’elle ne souffre pas.

Nathan emporte Ilona un peu plus loin sans répondre, puis il la pose au sol à l’abri du regard de ses collègues. Il la maintient debout, car elle tremble trop et se penche pour lui parler – il fait une tête de plus qu’elle.

– Ilona, qu’est-ce que tu faisais ici ?

– J’allais faire des courses. Et toi, pourquoi tu m’as dit que tu venais me retrouver ?

– Je pensais m’occuper du vampire d’abord et te voir après. On doit causer.

(Oh-oh…) Es-tu vraiment sûre de vouloir sortir avec moi ?

– Hein ?

– Je ne suis jamais là. Peut-être que tu veux voir des garçons de ton âge – humains, de préférence – et qui ne sont pas des tueurs professionnels ?

 

Elle cligne des yeux, n’en croyant pas ses oreilles.

– Tu as quel âge déjà ?

– Vingt-quatre ans.

– Ah. J’avais oublié, c’est vrai.

Elle baisse la tête, les larmes aux yeux. Il n’est pas si vieux que ça, si ?

– Je suis dangereux et pas politiquement correct. Je ne crois pas que ta famille m’apprécierait…

 

Ça y est. De grosses gouttes salées coulent sur ses joues. Elle lutte pour les lui cacher, tête baissée, mais il n’est pas complètement stupide.

– Ilo…

– Pourquoi tu me dis de telles horreurs ? C’est la deuxième fois que je te vois et tu me dis que tu veux rompre ?

– Hein ? Non, non !

– Tu sais, je ne sors pas avec n’importe qui. Et je savais déjà que tu étais une personne dangereuse, vu que tu m’as poursuivie et menacée avec un couteau lors de notre première rencontre. Je t’aime vraiment. Mais si tu préfères aller avec quelqu’un d’autre je ne…

– Non ! Je voulais avoir ta… confirmation. On s’est un peu précipités et je croyais que tu te lasserais d’avoir une relation à distance.

– Je ne suis pas comme ça, se vexe-t-elle un peu.

 

Ses yeux s’adoucissent et il ramène sa tresse blonde derrière son épaule, lui saisissant le menton et murmurant contre ses lèvres :

– Je m’assurais simplement de ce que tu désires vraiment… mais je ne savais pas que tu m’aimais.

La bouche d’Ilona s’ouvre comme celle d’un poisson hors de l’eau et elle cligne des yeux :

– J’ai pas dit ça !!

– Oh que si ! ricane-t-il avec un sourire triomphant.

 

Elle fait la moue. Elle ne supporte pas de s’être livrée aussi rapidement et facilement. Ça lui a échappé, ce qui la perturbe un peu parce que cela ne lui arrive jamais.

– On va se boire un truc ? Non, réfléchit-il, j’ai une meilleure idée : un ciné. Avec ma tête, les gens flippent.

Elle se souvient soudain qu’à la base elle est partie pour faire des courses… Bof, ça attendra.

– Moi j’aime bien tes tatouages. Ça te rend exotique, dit-elle en rougissant comme une pivoine.

 

Il la prend par les épaules en riant et lui plante un baiser sur le haut du crâne.

Ils retournent vers la route, sortant du grand parc et il met sa capuche.

– Alors ? Quoi de neuf ?

– Rien de spécial, je prépare mes exams et supporte ma soeur qui fait une fausse dépression. Ah ! À propos, comment va Steve ?

 

Il hausse les épaules, n’appréciant pas de parler de l’ex de sa girlfriend.

– Il a fait son récalcitrant au début, mais maintenant il file droit.

– En quoi consiste la formation de gens comme toi? fait-elle avec curiosité.

– Moi je savais dès le départ que je deviendrais un chasseur, car j’adore ça. Et rester enfermé ne me convient pas. Alors, je me suis entraîné depuis longtemps pour le combat et la course, puis j’en ai parlé à mes professeurs pour qu’ils ne me fassent pas faire trop de trucs d’intellos.

Ensuite ils nous ont sélectionnés parmi les plus prometteurs, ils éliminaient les plus faibles, les peureux ou ceux qui n’étaient pas faits pour ce job, puis j’ai suivi une formation.

– Et en quoi consiste ton travail exactement ?

– Nous nous occupons de traquer et tuer des vampires, neutraliser des loups en cavale qui peuvent s’avérer dangereux ou amener ceux qui ne savent pas ce qu’ils sont au sein de la meute principale. Mais j’ai aussi joué les gardes du corps une fois.

– Moi je n’ai pas vraiment d’idées pour plus tard.

– Tu veux voir quoi comme film?

– Avengers.

– Je croyais que tu aimais les trucs plus… enfin, plus « fille ».

– C’est ça. Et pourquoi pas les bisounours?

 

Ils arrivent au cinéma et il insiste pour payer les billets. Elle note que son capuchon, assez large, dissimule la partie droite de son visage sans qu’on puisse le trouver louche.

Elle entr’aperçoit soudain une camarade de son cours d’espagnol qui la dévisage avec curiosité. Zut. C’est la pire pipelette du lycée, elle est à l’origine du 3/4 des rumeurs qui y circulent. Ilona aura à se justifier plus tard.

 

Nathan lui offre une boisson et une glace. Il se prend la même chose ainsi qu’un paquet de pop-corn à partager.

– Je viens de voir une connaissance…

– Ah ouais ? T’auras qu’à lui dire qu’on est ami, ta réputation sera intacte.

– Elle ne me croira jamais.

– Tu ne sais pas mentir ? s’étonna-t-il

Ils s’installent dans les fauteuils situés tout à l’arrière, car il aime avoir une vue d’ensemble sur la salle.

– Non, je préfère rester honnête d’habitude, ironise-t-elle.

– Je vais t’apprendre : déjà tu ne dois pas détourner ou cligner des yeux, sinon c’est trop suspect. Regarde-la bien en face et parle-lui sans buter sur les mots. Ensuite, évite de tripoter tes mains, ou de te dandiner. Puis n’insiste pas si elle te vanne. Elle verra que ça ne t’affecte pas et en déduira que je ne suis qu’un pote. Argumenter la conforterait dans l’idée que je sors avec toi.

-Est-ce que tu as dû suivre des cours pour apprendre à mentir aux humains durant ta formation ?

-Bin, en réalité je devais justifier mes retards répétitifs à mes parents le soir.

Elle s’étouffe de rire en buvant son coca. Le film commence.

 

Deux heures, deux glaces et un pop-corn plus tard ils sortent du cinéma.

– Ça te dérange si je ne te prends pas la main ? J’ai la peau plus sensible que les humains et ça me stresse, les contacts physiques…

– Et moi je n’aime pas les démonstrations d’affections au milieu de la rue.

– Je crois qu’on est faits pour s’entendre, lui sourit-il.

– Oui. (Elle est songeuse un instant.) Mais alors, comment fais-tu pour coucher avec quelqu’un ?

Il trébuche.

– Hein ?! Tu penses à quoi là?!

 

Elle hausse les épaules.

– Pure curiosité scientifique. Ça m’intéresse d’en savoir plus sur ton peuple et toi.

Il la regarde de travers et ils continuent à marcher. Le soleil va bientôt se coucher et les passants se dépêchent de rentrer chez eux, contrairement au couple qui flâne.

– Plus je suis longtemps avec une personne, plus je m’habitue à elle, à son odeur, à sa présence… Mais c’est plus simple avec quelqu’un de mon espèce.

 

Il s’arrête brusquement, pris d’un énorme doute.

– Qu’est-ce que tu as ?

– Tu… t’as quel âge Ilona ?

– Dix-huit ans. Pourquoi ?

– Ouf ! Non, pour rien, mais si tu avais été mineure…

– T’aurais rompu ?!

– Non. J’aurais attendu avant de faire ça.

– Ça ?

– Ça !

Il la pousse dans l’ombre d’une ruelle et lui bloque les épaules contre le mur. Il se penche lentement sur ses lèvres et elle lui entoure le cou de ses mains, charmée.

 

 

– Tu rentres à cette heure-ci ?

Il est temps de mettre en pratique les conseils de Nathan : Ilona respire calmement et regarde sa mère dans les yeux, tout en se débarrassant de son manteau.

– J’ai croisé un ami, on s’est maté un ciné.

– Et mes courses ?

– Les voilà.

 

Elle tend le cornet à sa mère et monte dans sa chambre, jubilant de l’avoir bluffée.

– Un « ami », hein ? ricane Jenna, appuyée contre la rambarde de l’escalier. On va te croire, tiens !

– C’est un pote. Mais pour toi, un mec, c’est à usage unique, comme les mouchoirs. Je me trompe ?

 

Sa soeur rougit et s’enferme dans sa chambre. Elle va certainement revenir à la charge, ou se plaindre à leur mère, mais Ilona ne se laissera pas faire. Elle entre dans sa propre chambre et ôte son écharpe devant la glace. Elle remarque une rougeur à la base de son cou, qui ne peut pas être un suçon vu que Nathan l’a juste embrassée. Bah, ça ne doit pas être important. Elle le cachera avec du fond de teint.

 

Elle est sur un petit nuage, car son chéri reste encore le lendemain. Elle pourra manger au restaurant avec lui, ou se balader peut-être ? Comment se préoccuper d’une rougeur quand on vient d’être embrassée par la personne qu’on aime ?

 

C’est néanmoins une grave erreur. Car pendant cette nuit -la nuit précédant celle de Noël – Ilona se lève, obéissant à une voix et sort dans le froid pour accomplir un dessein méconnu.

Au matin, elle ne se souviendra de rien.

 

À suivre

 

 

Note de l’auteur : Les personnes entre 16 et 25 ans reconnaîtront peut-être le titre ! Je n’avais pas du tout fait le rapprochement au début et quand je m’en suis rendu compte, j’ai décidé de le garder, c’est un petit clin d’œil. Pour ceux qui n’ont pas compris, je vous donne un indice : ça a un lien avec le nom de l’héroine…

Joyeux Noël à tous !

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