Voici un extrait du chapitre 1 du tome 2 de Tim et Wes^^ Timothy est à la fois excité de revoir Wesley et stressé de rencontrer sa « belle-famille ». Lui feront-ils bon accueil? 😀
– Au revoir, me sourit l’hôtesse de l’air, merci d’avoir choisi notre compagnie.
– Au revoir. (J’arrive à lui rendre son sourire en agitant deux petites bouteilles vides qui tintent en s’entrechoquant.) Et encore merci pour les mignonnettes !
– Pas de quoi, rit-elle. Je m’y connais en angoisses et en mal de l’air. J’espère que ça vous aura un peu détendu !
J’acquiesce et avance pour ne pas bloquer les passagers derrière moi. Si elle savait : j’ai parfaitement l’habitude de prendre l’avion ! Si au décollage j’étais tendu comme un string, c’était pour une tout autre raison.
Je vais rencontrer les parents de Wesley.
En y repensant, je manque trébucher en descendant de l’avion et m’étaler le nez dans le tapis (ou plutôt, sur la piste d’atterrissage). Je me ressaisis et me dirige vers le minuscule aéroport, tirant ma valise derrière moi. Hier soir, j’ai tellement paniqué que j’ai vomi mon souper dans les toilettes, l’estomac en vrac ! Et je n’ai pas réussi à fermer l’œil de la nuit. Si ça se passait mal dès le début ? Je vais passer deux semaines d’enfer ! S’ils me détestent ? Me trouvent vulgaire ? Inintéressant ? Qu’ils m’ignorent ?
Je réalise maintenant ce que Wes a subi quand je l’ai presque obligé à passer Noël dans ma famille de tarés –alors qu’on ne sortait ensemble que depuis un mois et demi à tout casser. Il a sûrement flippé un max avant de les rencontrer ! (Après, une fois sur place, ça a été ; ils l’ont quasi adopté.)
J’entre dans l’aéroport sur climatisé, quittant la chaleur brûlante de l’extérieur : il s’agit d’un hangar avec d’un côté un guichet avec l’arrivage des bagages et, de l’autre, un guichet pour acheter les billets. Au milieu, trois rangées de sièges en plastique dur. Je cherche mon beau blond préféré en m’intimant au calme. Bon, respire mon pauvre Tim. Calme-toi. Ils ne vont pas te manger…
– Hey, Tim ! m’appelle une voix.
Je sursaute et fais volte-face, stressé. Wes marche dans ma direction, accompagné par une grande fille blonde.
– Oh, je fais, nonchalant, en m’appuyant sur le manche de ma valise. Hello !
Plutôt crever que de montrer que j’angoisse à mort ! Mon copain hausse un sourcil.
– Ça va ? Le vol s’est bien passé ?
– Cool, man. Pas de souci, tout baigne.
J’ai juste dû siffler deux mignonnettes pour tenir dans l’avion. Ça m’a calmé, je ricane mentalement.
– Voilà ma grande sœur : Chelsea.
Cette dernière me dévisage comme pas permis : elle me lorgne en essayant de ne pas sourire. Elle me tend la main.
– Salut, Timothy, ravie de te rencontrer enfin, dit-elle d’un ton lourd de sous-entendus .
– Salut, je marmonne en rabattant ma frange en arrière et en lui serrant la pince.
Sauf qu’elle ne me rend pas ma poignée de main. Inquiet, je relève la tête : elle me fixe, la bouche grande ouverte. Qu’est-ce qui lui prend ?! Elle tente de gober une mouche ?
– Que … Qu’y a-t-il ? je demande.
Elle cligne des paupières.
– Putain ! s’exclame-t-elle. Claudia n’exagérait pas alors ? (Je hausse les sourcils, n’y comprenant rien.) La vache, t’es super mignon !
Je sens mes oreilles devenir écarlates, à la fois surpris et flatté. Ses iris bleu clair ne quittent pas mon visage une seconde.
– Me…merci, je balbutie.
– Arrête de le lorgner de la sorte, s’énerve Wes. Tu le gênes à le fixer autant.
– Mais regarde, frangin ! fait-elle en le poussant du coude. Il a de grands yeux avec des cils pires longs, un petit nez trognon et il a la peau qui a l’air toute douce ! (Elle se tourne vers lui d’un mouvement vif.) Il est plus beau que n’importe quelle fille du village ! Et c’est une miniature ! Une poupée ! Il est trop chou !
– Ça va, ça va ! lâche-le, t’es lourde ! grommelle-t-il en ramassant ma valise.
Il me pousse en direction de la sortie. Je peux bien être une miniature comparé à elle, non mais ! Je ne dépasse pas le mètre 65 et Chelsea n’a rien à envier au mètre 88 de Wesley. J’ai l’impression d’être un nain entre eux deux –mais bon, ça ne change pas grand-chose par rapport à ma famille…
– Je me trouve bien gentille de t’accompagner jusqu’à l’aéroport, réplique-t-elle.
– J’aurais très bien pu conduire tout seul, râle-t-il. Mais tu voulais venir voir à quoi ressemblait Timothy avant tous les autres !
– Même pas vrai ! J’avais peur que tu massacres ma voiture avec ta conduite de sauvage !
Nous émergeons du côté du parking, le soleil me vient en pleine figure. Je suis sceptique : pour avoir vu Wes conduire, je le trouve particulièrement prudent.
– Vous habitez loin ? je demande pour engager la conversation.
– Ouais, assez, lâche mon petit copain.
– Deux bonnes heures de trajet. Ici c’est la seule ville des environs où il y a un aéroport. Et une gare. (Elle s’égaie et déverrouille la portière d’une bagnole grise un peu cabossée, à la peinture qui s’en va par endroits.) Je travaille ici en semaine, dans une boutique de produits de beauté et d’habits.
– En semaine ? je répète en m’asseyant à l’arrière.
Wes met ma valise dans le coffre et s’installe à côté de moi.
– Oui ! Là, je suis en vacances, pépie-t-elle en réglant son rétroviseur. (Elle se tourne vers nous et esquisse une grimace comique.) Je partage une colocation avec deux amies, mais tous les week-ends, je dois rentrer à la maison. Quelle plaie !
– Maman ne t’a rien demandé ! C’est toi qu t’incrustes comme un coucou.
Elle rigole et lui enfonce le poing dans l’épaule. Elle boucle ensuite sa ceinture et démarre pour s’extraire de sa place de parking.
– J’espère que je ne serais pas trop lourd pendant deux semaines, je m’inquiète.
– Mais non ! fait-elle, bon enfant. Tu es le bienvenu !
– Y manquerait plus que tu te fasses du souci pour ça, chuchote Wesley, furibond. C’est ma mère qui a décidé de t’inviter ! Tu ne t’es pas imposé !
– J’ai peur de déranger…
– C’est bon, arrête de t’inquiéter. En plus, on vit pas dans un palace.
Il regarde la route, se tenant au siège devant lui à cause de la voiture qui tangue, n’ayant sûrement plus de bonnes suspensions. Les rembourrages semblent défoncés, les tissus sont griffés et il y a tout un tas de trucs qui traînent à mes pieds : un sachet de bonbons vide, un exemplaire de magazine féminin et des tickets froissés. Malgré les vitres un peu floues et la persistante odeur de tabac à pipe, je me sens bien dans cette voiture. Qu’est-ce qui m’arrive ? D’habitude je ne ressens rien de particulier en montant dans la bagnole de ma sœur ! Mais là, tout mon corps est détendu, j’ai l’impression de me calmer en sentant le vent me caresser la tête…
Drôle de sensation.
– Toute votre famille est à la maison ? je m’inquiète soudain.
Je m’angoisserai moins en sachant combien de personnes je dois affront… euh, rencontrer.
– Mmh, il y a maman, réfléchit Chelsea. Peut-être Claudia et Cherry aussi.
– Cherry est votre plus petite sœur ? je m’enquiers.
– Oui, elle a douze ans, me répond Wesley. (Il capte mon regard étonné.) Elle est beaucoup plus jeune. Elle… enfin, disons que mes parents ne s’attendaient pas à l’avoir.
– Elle a la santé un peu fragile, reprend sa grande sœur. Pas des problèmes très graves : un peu d’asthme, une allergie au pollen… Du coup, elle ne sort pas beaucoup. Elle ne se fait pas beaucoup d’amis. Et comparée à Claudia à son âge… (elle éclate de rire)… elle est sage comme une image.
– Les parents la couvent et la gâtent un peu trop parfois. Et nous aussi d’ailleurs, m’explique mon copain.
– Je vois, je hoche la tête. Votre père est à la maison aujourd’hui ?
– Non, il bosse tous les jours… (Elle me lance un coup d’œil intrigué dans le rétroviseur.) Le tien a congé pendant le spring break ?
– Ouais, je soupire. Il est prof, du coup, il a un max de vacances.
– Quelle branche enseigne-t-il ?
J’esquisse un sourire sans joie.
– Prof de sport au lycée. Je l’ai eu pendant trois ans… Trois putains d’années où il a vainement tenté de me faire participer à ses cours.
– Aïe ! compatit-elle. Dur !
Le trajet se déroule plutôt rapidement. Comme on approche de l’heure du dîner, nous faisons une brève halte dans un fast-food pour manger un ou deux burgers et des frites. L’ambiance est détendue, mais je sens les regards des consommateurs peser sur moi et ça me met mal à l’aise. Je m’y attendais en partant : je vais arriver dans un petit village où, comme dans mon bled, on n’apprécie pas trop les personnes qui ne rentrent pas dans les cadres stéréotypés. Les hommes sont massifs, taillés pour les travaux physiques et élevés au grain ; les femmes sont grandes, ont les cheveux longs, même les gosses ont l’air plus solides que moi ! Un bref frisson me parcourt lorsque je me remémore les couches de vêtements que j’enfilais pour me soustraire aux yeux malveillants de mes voisins.
Puis je me rappelle que cette époque est derrière moi et je me redresse fièrement. Après tout, je suis invité par les Doggan pour deux semaines, Wesley est là pour me protéger s’il arrive quoi que ce soit et je sais me défendre ! C’est pas deux-trois péquenauds mal dégrossis qui vont réussir à me faire sentir pas à ma place ! Tsss !
Pendant le trajet, je discute beaucoup avec Chelsea (de boulot, d’études, du temps et des différences entre vivre en ville ou en campagne), mais Wes reste étrangement silencieux à mes côtés. Non pas que d’habitude il soit un grand bavard –contrairement à moi ! –, mais quand il fixe le vide en fronçant les sourcils sans raison apparente, c’est qu’il rumine. Quelque chose doit le préoccuper. Mais je lui poserai des questions plus tard (quand nous serons seuls tous les deux)…
– On y est bientôt.
Effectivement, nous arrivons vers un petit village. Nous passons près du panneau, j’y lis « Bienvenue à Lakes Dale ». La Vallée des Lacs.
– La région compte pas mal de lacs de différentes tailles, m’explique mon petit copain en notant mon intérêt. Ce village se situe au bord du plus grand, on a même un petit port. L’attraction de l’été est de faire le tour des étangs et des rivières pour s’y baigne. Les gens des bleds alentour font pareil.
Sa frangine nous lance un regard surpris, puis se concentre à nouveau sur la route, un peu troublée.
La maison des Doggan se situe à un kilomètre du centre, assez à l’extérieur du village. Il n’y a que trois maisons en vue, et elles sont plutôt éloignées. Rien à voir avec les banlieues aux baraques super serrées, comme si elles voulaient se protéger les unes des autres. Là, les espaces sont immenses ! J’inspire à fond une bouffée d’air chaud sentant le sapin en sortant de la voiture.
En portant ma valise (suivant sagement Wes) je détaille l’habitation : immense, tout en bois, avec un porche blanc, elle fait deux étages plus le grenier et il y a une grange sur le côté. J’imagine parfaitement mon copain grandir ici ! Je le vois en train de jouer dans le jardin avec sa soeur à peine plus âgée, leur mère travaillant dans le potager. Tiens ! Ça me donne envie de savoir comment il était petit ! J’espère réussir à dénicher un album, hé hééé…
– Maman, on est revenus, annonce-t-il en poussant la moustiquaire pour entrer (la porte était déjà ouverte).
Nous sommes dans un hall très encombré donnant sur un couloir assombri. Un escalier brun usé, une tonne de chaussures en vrac et des dessins d’enfants au mur se côtoient harmonieusement. Une femme d’une bonne quarantaine d’années émerge d’une pièce.
– Bonjour ! me sourit-elle. Tu es Timothy ?
Elle a l’air fatiguée, mais son expression est douce. Elle a des cheveux châtain clair retenus en une queue de cheval lâche. Elle est (évidemment !) plus grande que moi, mais d’une demi tête seulement et porte une robe blanche légère qui lui descend aux genoux. Elle n’est ni grosse, ni mince, mais on voit qu’elle a porté quatre enfants.
– Oui, Madame. Bonjour, je fais, poli.
– Mon prénom est Carolann. Tu peux me tutoyer si tu veux. (Elle désigne l’escalier.) Va poser tes affaires et t’installer tranquillement ! Je vais préparer de la limonade bien fraîche pour tout le monde. C’est pas un temps à manger dehors ! Jamais vu une chaleur pareille depuis des années, secoue-t-elle la tête en se dirigeant vers le couloir.
– Suis-moi, m’intime Wesley en prenant ma valise.
– Je vous rejoins plus tard ! nous lance Chelsea en s’éclipsant, nous faisant un petit signe de la main.
– J’aime bien ta mère, elle a l’air plutôt sympa. (J’hésite.) Enfin, je la trouve plus sincère que la mienne.
– J’ai pourtant l’impression que Gladys était au contraire très directe.
– Ouais… Mais avec les gens, elle est assez hypocrite parfois.
Arrivés à l’étage, nous longeons un couloir bordé de chambres, puis il monte un second escalier au bout duquel se trouve une porte close.
– C’est ma chambre, m’annonce-t-il.
J’écarquille les yeux. Quoi !? Ses parents sont d’accord pour que je dorme avec lui !? Mon petit cœur s’emballe : si je passe deux semaines avec lui, je risque de ne pas me retenir ! Après tout, tout le monde sait que je suis un obsédé ! J’ai de la patience, mais je ne suis pas un moine…
– Pourquoi tu dors sous les combles ? je demande en inspectant sa piaule.
Une grande fenêtre, de la tapisserie, un placard à même le mur et un vieux tapis… Rien de bien extraordinaire…
Même pas des posters de volleyeuses ou de nageuses à poil sur les murs. (Les traditions se perdent !)