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Happy new year bébé (Partie 2)

Happy new year bébé (Partie 2)

 

Aujourd’hui samedi 31 décembre, c’est jour de congé… et donc grasse mat ‘ en perspective.

Ilona se réveille à midi, complètement crevée par cette nuit que quelqu’un a effacé de son esprit.

-Bien dormi? s’enquiert-elle auprès de son invitée non désirée.

-Pas mal.

 

Apparemment elle n’a pas l’intention de lui rendre la politesse ! Sans s’en formaliser, Ilona consulte ses SMS, ne pensant pas trouver grand-chose. Aussi est-elle surprise quand elle voit un court message de Nathan :

Vs ds rég ! Fts gaf Urs

-Ursu… euh, Nolwenn? Ce message t’es destiné, je crois.

Cette dernière pâlit en décryptant le charabia de son ami.

-Des complications ? chuchote Ilona.

Des vampires dans la région. Fais gaffe Ursula ! », traduit la louve. Ouais, on est dans la merde. Écoute, ne bouge pas de là, je vais me renseigner en ville, OK ?

-Bien sûr, acquiesce l’autre, l’estomac dans les talons.

 

Les nouvelles que ramène Ursula un peu plus tard n’augurent rien de bon.

-Mon contact pense qu’ils veulent venger John. Ils te cherchent toi car l’un d’eux a entendu une conversation entre des loups. Ils sont une dizaine et à peine à un kilomètre d’ici.

-Combien de temps avant l’affrontement ?

La géante ouvre de grands yeux.

-On se tire ! Qui te parle d’affrontement ?

-Mais vous avez tué un vampire…

-On était à cinq contre un ! Un loup-garou ne peut rivaliser avec un seul vampire, alors imagine avec une dizaine !

-Je vais prévenir ma mère que nous partons.

-On n’a pas le temps, ils seront là dans quatre minutes max ! piaille Ursula en chopant la blonde par le bras et en l’entraînant dehors.

(Quatre minutes ? Waah, c’est rapide.) Comme Ilona n’est qu’une humaine, elle ne peut pas aller aussi vite que la louve le voudrait et l’autre la tire presque. Elles atteignent le fameux parc où la jeune humaine et le vampire se sont croisés il y a moins de dix jours et Ursula décide d’employer les grands moyens.

-On ne leur échappera jamais comme ça. Il faut que tu montes sur mon dos.

 

Elles passent entre deux maisons pour ne pas être vues et se dirigent vers la forêt du parc qui se situe juste à côté de la maison des Simmons. Croyant halluciner, Ilona regarde Ursula se dévêtir en plein milieu d’une clairière enneigée… et se transformer en loup.

Des poils lui sortent du corps très rapidement et elle tombe à quatre pattes.

-Aller, grimpe sur mon dos !

-Comment arrives-tu à parler ?

-C’est pas le moment de faire causette, gronde-t-elle en montrant les crocs. Monte !

Ilona s’installe sur la croupe de l’animal et s’agrippe à son cou.

-Ne tire pas mes poils ! couine-t-elle en se mettant à courir.

 

Appréciant la vitesse, la jeune fille passe sa main dans la fourrure rêche d’Ursula. Elle se déplace plus vite que n’importe quel autre animal. Les troncs deviennent flous, mais elle parvient à rester en équilibre sur son dos. Quelle sensation enivrante ! Comment est-ce que ça serait avec Nathan ?

Malheureusement, l’ivresse passe et les trouble-fêtes débarquent. Ils sont infiniment plus rapides, Ursula a surestimé ses capacités en s’imaginant les semer. Ils l’encerclent et Ilona compte onze vampires.

Et elle fait la chose la plus stupide du monde ! Elle saute à terre et file entre les buissons, trop rapide pour que les vampires songent une seconde à l’arrêter.

Ce qui est normalement impossible quand on est une humaine.

 

Six la poursuivent tandis que les autres s’occupent d’une Ursula folle de rage. Ilona court, mais sa tête veut retourner en arrière. Ses jambes et ses pieds sont contrôlés par une entité extérieure.

On la possède.

Elle stoppe près d’un gros rocher et fait face aux vampires, loin des yeux et des oreilles de la louve. Ils dévoilent leurs crocs en feulant comme de gros matous furieux.

-Bande d’incapables ! Vous croyez vraiment que des loups auraient pu me tuer ?!! hurle Ilona.

 

Elle écarquille les yeux; ça n’est pas sa voix, mais celle de John, qui sort de sa propre bouche!

-Maître John? s’étonne le plus grand vampire.

-J’habite le corps de cette fille, le temps de trouver mieux. Je n’avais pas le choix, les loups m’avaient retrouvé. En la mordant, je l’ai transformée en Servante.

-Votre vrai corps s’est changé en brume?

-Oui.

L’immortel s’était donc changé en brume et pas en cendres ? s’étonne Ilona. Mais quelle différence est-ce que ça fait ?

-Quand vous rappellerez votre corps, il reviendra ? demande un des sbires vampires.

-Exact, répond John à travers la jeune femme. Pour l’instant, mes aptitudes surdéveloppées sont dans ce corps malingre : ma force, mes yeux, mes crocs, mes griffes, mon ouïe et mon odorat.

-Maître, faites attention. Si elle se fatigue trop, dépérit et finit par mourir, vous disparaîtrez avec pour toujours. Vous vous devez de la ménager.

Ilona/John pose son index sur ses lèvres roses d’un air songeur.

-Je n’y avais pas songé. C’est agaçant ! Bof, hausse-t-il les épaules, je ferai avec.

 

Les vampires s’inclinent et disparaissent. Ilona sait immédiatement quoi faire après avoir retrouvé le contrôle de son corps : s’engueuler elle-même.

-Nan mais ça va pas s’pèce de malade?! Qu’est-ce tu fous en moi ?! Tu te casses de suite ou… ou…

« Ou quoi? raille la voix dans sa tête. Tu vas te suicider ? »

-Oh mon dieu… j’espère que vous ne me regardiez pas quand je m’observais dans la glace… hum, très dévêtue ?

« Je n’ai qu’une chose à te dire : très beau corps ! Et j’en ai vus dans ma vie, je m’y connais ! »

-Oh my gooooood! Vieux pervers ! Vicieux ! Sortez immédiatement !

«  Je dois récupérer, je suis très faible. Transférer mon esprit dans ton corps, séparer ma psyché de ma chair m’a pris énormément d’énergie. »

-Je m’en fous, barrez-vous ! Ou j’en parle à Nathan.

« J’ai un contrôle total sur ton corps. Tu ne peux rien dire sans mon accord. »

-Oh non…

« Et autant te le dire maintenant, enfonce-t-il le clou . Pour me nourrir, tous les soirs, j’ai tué des gens et j’ai bu leur sang. Avec ta bouche. »

 

Ilona secoue la tête, écœurée. Son esprit ne peut le concevoir, la voix est trop irréelle.

-Je vous en prie, allez-vous-en ! gémit-elle.

« Tu as tué. Tes mains sont couvertes de sang d’une dizaine de personnes… »

-Je fais une dépression chaque fois que j’écrase une mouche… c’est impossible.

« C’est la vérité. »

-Laissez-moi tranquille. Rendez-moi ma vie, barrez-vous… murmura-t-elle, au bord des larmes.

« Ilona Simmons, rien n’est dû au hasard. Tu t’es entichée d’un Homme-Loup. Ton existence ne sera plus jamais tranquille et paisible. Mais tu m’as l’air d’être une jeune femme qui aime l’action. Notre rencontre et mon choix de prendre ton corps n’est peut-être pas un hasard. Le futur nous révélera sûrement l’issue de cette union non désirée. »

Elle se fige. Les paroles du vampire, bien qu’elle le déteste, sont étrangement justes. Elle aime Nathan, bien qu’il soit un tueur et une créature dangereuse. Peut-être va-elle devoir endurer beaucoup de choses pour rester à ses côtés ?

 

Elle ne remarque pas le frisson d’excitation qui lui parcourt le dos. Une femme d’action…

-Hé ! La blondasse !

Ursula surgit d’entre les arbres, les poils dressés et les crocs découverts.

-T’ai-je dit de te barrer de mon dos alors qu’une bande de sangsues nous encerclait ? Je pense pas !

« Dis-lui que tu leur as tout expliqué, qu’ils ont sondé ta tête et sont repartis, ordonne John. »

 

Ilona répète mot pour mot ce que l’immortel lui a soufflé et Ursula hausse un sourcil –enfin, autant qu’un loup pouvait hausser un sourcil !

-Sondée? Quel effet ça t’a fait?

Ilona la regarde droit dans les yeux, mais commence à suer.

« Désagréable. On aurait dit qu’une ventouse aspirait mes moindres pensées. »

Elle répète pour la deuxième fois ce que John dit. Il l’aide, mais dans son intérêt. Espérant le piéger, elle essaie de prononcer : « j’ai un vampire dans la tête », mais les mots restent coincés dans sa gorge. Flûte! Le vampire avait raison.

 

Un autre loup surgit, plus grand et plus impressionnant encore, noir comme la nuit. Si l’encolure de Ursula arrive à l’épaule d’Ilona, celle de cet imposant animal dépasse le sommet de son crâne.

-Tout va bien Ilona? Ils ne t’ont pas blessée ?

-Nathan ? souffle-t-elle, estomaquée.

-Ha ha ha! Je te fais peur ?

 

Elle s’approche, fascinée et passe ses doigts dans le pelage de son copain. Il frémit et baisse son énorme tête à la hauteur de la jeune fille, plongeant ses yeux dans les siens.

Elle esquisse un sourire incrédule : il possède un regard similaire à celui qu’il a quand il est humain. Ilona fond comme neige au soleil et entoure son cou de ses bras. Il s’appuie contre elle et elle manque se casser la figure.

-Non, tu es la créature la plus merveilleuse que j’ai vue dans ma vie, murmure-t-elle en posant son nez sur sa truffe humide.

Ursula lève les yeux au ciel et souffle. Maudite soit l’ouïe des loups-garous !

 

 

-Allô maman ? Oui, je passe le Nouvel An avec des amis et Nolwenn. Non. Oui. Bien sûr, à plus tard. (Elle ferme son portable d’un claquement sec.) J’ai la permission de deux heures du mat ‘ les gars !

Les copains de Nathan émettent un « wéééé » général. Ils ont loué une salle dans un restaurant du centre-ville et vont fêter le Nouvel An ensemble. À la grande surprise d’Ilona, ils l’ont invitée à rester avec eux. Apparemment Ursula est la seule à se formaliser qu’un de leurs chasseurs sorte avec une bête humaine ! Tss !

 

Il y a quelques femelles, dont Ursula, et toutes semblent curieuses envers cette petite blonde qui a séduit le grand méchant loup. (Et un peu jalouses, autant ne pas se mentir !)

Le grand méchant vampire quant à lui se cache au fond de l’esprit d’Ilona, évitant de faire des commentaires sarcastiques à Ilona, car il n’est pas très à l’aise avec tous ses loups autour de lui.

Tous ne sont pas des chasseurs. Le groupe comprend une vingtaine de jeunes et ils ont chacun une permission de sortie apparemment. Ilona n’ose pas trop leur poser des questions directes comme elle le fait avec Nathan, elle n’a pas envie de les froisser par erreur.

 

Peu avant minuit, la fête bat son plein. Nathan emmène sa petite amie dans une pièce à côté, où il y a de larges sièges moelleux. Il s’y assied et la prend sur ses genoux.

-Pourquoi m’as-tu surveillée avec ces yeux là pendant toute la soirée ? demande-t-elle.

-Je ne veux pas te ramener saoule à la maison. Tes parents te priveraient de sortie.

-Je n’ai bu que quelques gorgées de vin, quel vieux jeu tu fais !

-Vieux jeu ? chuchote-t-il à son oreille. Vraiment…

 

Ses lèvres effleurent le cou d’Ilona et ses mains glissent sur ses hanches.

« Tsss! Le vieux truc du cou. C’est d’un minable… »

« La ferme John. J’ai le droit à un moment d’intimité avec mon mec quand même ! réplique-t-elle. »

« M’en aller quand ça devient croustillant? Rêve pas blondinette… »

« Pauvre type! »

-Ilona? Est-ce que ça va? Tu m’as l’air ailleurs…

-Non! Je… je suis fatiguée, c’est tout.

-Tu es très pâle. Et tu as maigri.

 

Elle hausse les épaules et l’embrasse. Elle repousse l’esprit du vampire et s’imagine l’enfermant dans une pièce capitonnée : cela fonctionne et John a beau tempêter, il ne peut sortir. Elle sourit et Nathan caresse son genou. Elle frissonne quand sa main remonte le long de sa cuisse. Waaah ! Il est vachement entreprenant ! Personne, même Steve n’a jamais osé aller aussi loin avec elle…

Elle passe ses doigts sous son t-shirt noir –ne porte-t-il jamais de couleurs ?!– pour sentir ses muscles. Ils sont bien dessinés, comme elle l’avait imaginé. Et où a-t-il appris à embrasser si bien ?

-Hé, les tourtereaux !

 

Ilona sursaute, mais pas Nathan –il a déjà entendu arriver Ursula.

-Minuit dans une minute !

Ils rejoignent les autres –un peu à contrecœur – et ils se servent un verre de champagne.

-10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1… bonne année !!!

Nathan immobilise la mâchoire d’Ilona de sa main droite et la regarde avec une intensité qu’elle ne lui connaît pas. Ils s’embrassent tendrement, puis il la serre contre lui. Elle enfouit son visage dans son épaule.

 

-J’espère que nous aurons moins d’ennuis cette année… Tu as enduré beaucoup de choses.

 

Elle ne lui réplique pas qu’un vampire dans la tête est peut-être une source d’ennuis possible, car John l’en empêche. Il est revenu. Sa gorge se serre d’inquiétude.

 

-Je t’aime… dit-elle simplement, espérant qu’il ne sente pas la pointe de tristesse dans sa voix.

 

Il ne répond pas. Il ne lui a jamais dit les mots magiques, et ça la peine. Même si elle peut attendre.

Nathan l’embrasse sur le front, de sombres pensées en tête, dont Ilona n’a pas conscience, trop préoccupée par les siennes…

 

À suivre

 

Note de l’auteur : Et voilà ! Pour l’instant c’est tout pour l’histoire entre Nathan et Ilona ! Il va falloir patienter un peu avant de pouvoir connaître la suite –que je n’ai pas encore écrite. N’hésitez pas à mettre votre avis sur ce chapitre !

Happy new year bébé (Partie 1)

Happy new year bébé (Partie 1)

 

Ilona Simmons tire ses cheveux blonds en une queue de cheval parfaite et examine son reflet dans le miroir. Mince, yeux bleus et silhouette élancée, tout est normal. Ce qui l’est moins, ce sont ces grands cernes mauves sous ses yeux. Pourtant, elle dort la nuit, et pas qu’un peu ! Elle s’effondre sur son matelas à 20 heures pour se lever difficilement à 7 heures le lendemain. Et ce, depuis plus d’une semaine.

 

Elle sort, emmitouflée dans sa grosse veste d’hiver et son écharpe. Elle se dirige vers la paroisse, frigorifiée. Elle s’est inscrite avant Noël pour aller rendre service au pasteur avec d’autres lycéens, elle en est quasi à le regretter à cause de son manque de sommeil ; elle paierait cher pour être encore dans son lit à ce moment-là !

Elle arrive juste à l’heure et s’assied à la hâte sur une chaise, essayant de ne pas se faire remarquer.

-Tu vas finir par être en retard.

 

Se débattant pour enlever sa veste, elle fusille du regard sa voisine de droite (ce qui est inutile, car ses beaux yeux bleus ne font jamais peur à personne), le pasteur se lève pour commencer la séance d’information.

-Bonjour. Je suis assez pressé au niveau du programme, alors on va faire rapidement les présentations : voici Nolwenn Foster, qui a déménagé ici il y a…?

-Deux jours.

 

Une nouvelle ? Ilona l’a complètement loupée ! Sa voix, venant d’un côté de la salle, est grave et bien posée, assurée. Ilona fronce les sourcils et se penche pour essayer de la repérer parmi le groupe de jeunes, car il lui semble l’avoir déjà entendue quelque part.

 

La peau mate, des yeux noirs insondables, une présence bien marquée et une haute stature, Nolwenn a tout le bas du visage recouvert de tatouages noirs qui s’arrêtent sur ses joues et passent même sur ses lèvres.

 

Notre blonde préférée a un sursaut en la voyant : est-elle un loup-garou ? Elle n’oserait pas aller le lui demander, ça ne se fait pas ! Et elle est peut-être seulement humaine, n’importe qui peut se faire tatouer.

Nolwenn pose son regard calme sur elle et la transperce de ses yeux acérés.

-Mademoiselle Simmons ? On ne dévisage pas les gens de cette manière.

L’intéressée fait volte-face, cramoisie, et tout le monde éclate de rire -sauf la nouvelle.

Elle va me prendre en grippe direct, songe Ilona.

 

Les travaux que leur confie le pasteur sont simples, pourtant la journée se déroule bizarrement. Ilona sent toujours Nolwenn l’observer, et quand elle se tourne pour vérifier, l’autre la dévisage sans gêne. Elle ne se montre pas très amicale avec les personnes qui l’abordent ; elle ne répond que par onomatopées et ne sourit pas, ne semblant pas vouloir se lier aux jeunes.

 

Être fixée ainsi pendant des heures est assez éprouvant, Ilona est vachement contente de retourner à la maison. Une fois au chaud dans l’entrée, elle pousse un long soupir.

 

-Ilona ? l’appelle sa mère. C’est toi ? On est dans la cuisine ! Rejoins-nous.

Nous ? Qui nous ? Il y a une visite surprise ?

-J’te raconte pas la journée que j’ai eue, soupire Ilona en traversant le couloir. On a…

Elle se fige sur le seuil. Nolwenn est assise en face de sa mère, une tasse de café à la main.

-Ton amie voulait te parler alors je l’ai laissée entrer pour papoter. Je ne savais pas que tu correspondais avec elle depuis si longtemps !

 

Ilona, la bouche ouverte, hésite à dire la vérité pour que sa mère vire cette intruse de la maison, mais une chose la décourage rapidement. Nolwenn se tourne vers elle avec une lenteur calculée et soulève le pan de son long manteau, dévoilant un couteau de chasse dans son fourreau.

-Tu ne lui as pas parlé de moi? dit-elle dans un sourire. C’est pas cool ça… On a mangé ensemble la semaine passée pourtant, et on s’échange des mails depuis des mois.

Ilona ne sait pas ce que cette fille veut, mais apparemment elle a envie de jouer à la meilleure copine. Nolwenn risque de les empaler si elle nie, ou pire !

-Franchement, quand elle a sonné à la porte avec tous ses tatouages je me suis dit : « Mais qui est cette grande perche ?! »

-Oui, marmonne Ilona. Au premier abord, on peut se méprendre. C’est une fille très… surprenante.

 

Et plus rapide qu’elle ! Ilona s’est dépêchée de rentrer, mais Nolwenn l’a devancée, et de beaucoup vu qu’elle a eu le temps de boire un café avec sa mère.

-On a des devoirs de vacances à terminer, annonce soudain la grande fille, dépliant son immense corps en se levant.

-Bien sûr, travaillez bien les filles !

La géante chope Ilona par le coude et la traîne à l’étage en lui faisant signe de se taire, un doigt sur les lèvres. Qui est-elle ? Que veut-elle ? Est-ce une simple détraquée ? Ou une ennemie de Nathan qui veut s’en prendre à la famille d’Ilona ?

Elle pousse cette dernière dans sa propre chambre et s’enferme avec elle.

-T’es plus coopérative que ce que j’pensais.

-Qu’est-ce que tu me veux ? Me tuer ?

 

Elle se laisse tomber sur le lit et -oh miracle !- sourit.

-C’est difficile à croire, mais je suis là pour te protéger.

-Bien sûr…

-Je suis une louve. Tu l’as tout de suite deviné, non ? Je suis une amie de Nathan.

-Comment pourrais-je te croire ?

-Je ne m’appelle pas Nolwenn, mais Ursula.

 

Ilona ouvre de grands yeux. Évidemment ! C’est pour ça qu’elle reconnaissait sa voix, elle l’a entendue dans la clairière il y a une semaine.

-Toi ! Tu es horrible, tu étais prête à me sacrifier pour attraper le vampire !

-Nathan mérite mieux… et il doit se concentrer sur son job, pas s’enticher d’une bête humaine.

-Il n’y a pas de niveau au-dessus de chasseur !

La louve hausse un sourcil, étonnée que cette pauvre fille sache ça.

-Non, admet-elle. C’est vrai.

-Pourquoi es-tu entrée comme ça chez moi et m’as-tu menacée avec un couteau ?

-Je n’aurais jamais blessé ta mère, t’inquiète. Pas seulement parce qu’elle est amusante, mais parce que je savais que tu m’obéirais si je te faisais peur. Je ne voulais pas que tu crées de scandale, c’est pour ça que j’ai recouru à cette méthode.

-Il y une chose que je ne comprends pas…

-Ça ne m’étonne pas venant de toi.

-… pourquoi tu joues les gardes du corps ? termine Ilona en la fusillant du regard.

 

La louve inspire profondément avant de répondre, choisissant bien ses mots :

-Le vampire qui t’a mordu… était très vieux et puissant. Il se trouve que sa salive peut te transformer en goule n’importe quand.

-En QUOI ?!

-Pchhhhhht ! Moins fort !

-Maismaismais… je veux pas devenir une… une goule ! (La blondinette se fige.) Qu’est-ce que c’est d’ailleurs ?

Ursula hésite, sentant que l’autre risque de péter un câble en apprenant la vérité.

-Un genre de… de zombie qui…

-PARDON ?! Quelle horreur !

-Silence !

-J’aime pas les zombies ! C’est dégueu et ça me donne des cauchemars !

-Att…

-J’adore ma vie ! Je veux pas dévorer des gens et devenir…

-Putain ! Laisse-moi terminer mes explications, merde !

 

Ilona la regarde d’un air paniqué et se mord la lèvre, au bord des larmes.

-Tu es ici pour protéger les autres de moi, hein ?

-Aussi oui. Mais principalement pour veiller sur toi. Nathan dit que tu as besoin d’être aidée si d’autres vampires veulent s’en prendre à toi.

-Oh my god.

-Il faut que je te suive 24h sur 24, car d’imperceptibles changements peuvent indiquer une transformation imminente.

-Bouhouhou… (Ilona percute ce que la louve vient de lui dire.) Attends, quoi ? 24h sur 24 ?

-Je dois rester dormir avec toi.

-Oh, mais bien sûr, ironise Ilona. Je vais faire passer en douce une louve de deux mètres pendant la nuit et la faire dormir sur le canapé du sa…

 

Elle s’interrompt au milieu de sa phrase, dévisageant Ursula comme si elle venait de comprendre les lois de l’univers tout entier.

-Quoique… Oui, ça peut passer.

-Hein ?

-Vu que t’as déjà charmé ma mère… je vais lui demander si tu peux rester dormir.

-Madame Simmons est plutôt sympathique pour une humaine… quel dommage qu’elle ait une fille telle que toi.

-Occupe-toi de ta propre mère, OK? Laisse la mienne tranquille.

-Mes parents ont été tués quand j’avais cinq ans.

 

Ilona se fige, la main sur la poignée, et bafouille :

-Je… excuse-moi.

L’autre hausse les épaules d’un air détendu.

-Tu ne savais pas. Bon, alors je peux m’installer ?

-Je vais lui demander pour ce soir, elle devrait être d’accord. Mais je ne te veux pas ici pendant dix ans, trouve-toi un autre endroit pour dormir !

-Ouais, ouais.

 

Elle s’allonge sur le lit d’Ilona et joue sur son portable. Pas gênée…

La blondinette dévale les escaliers, une boule dans la gorge. Ursula la déteste, mais elle n’a rien fait pour ça. Elle sort simplement avec Nathan ! On dirait que pour un loup, être avec un humain c’est la dèche.

-Maman ? Ursu… euh, Nolwenn peut-elle rester ici cette nuit ?

-Bien sûr. Je m’en doutais, j’ai déjà rajouté un couvert.

-T’es la best. Ci-mer, rit-elle en collant un bisou sur la joue de sa mère.

Elles montent au grenier pour prendre un matelas. Quand Ursula les voit entrer avec, elle bondit du lit et les aide immédiatement. Une fois la mère de famille partie, les deux jeunes filles font le lit.

-Comment tu connais Nathan ?

 

La louve lui accorde à peine un regard.

-La soeur de son père m’a adoptée.

-Waouh. Ça fait perpèt’.

-Ouais.

-Et vous êtes amis depuis ?

-Ouaich.

-Alors pourquoi ne supportes-tu pas qu’il soit avec moi ? Tu es jalouse ?

 

Ursula se redresse en soupirant et s’étire.

-Non. Mais franchement, une pauvre humaine blonde pleurnicharde… il aurait pu choisir mieux.

-La dernière fois, tu as parlé de filles qui tueraient pour lui, l’interroge Ilona, ignorant l’insulte.

-Oui, car il est fort, beau et intelligent. Il pourrait être l’alfa d’une grande meute, quand il aura cinq-six ans de plus, j’en suis sûre. Se trimballer avec toi va ruiner ses chances.

-Tu méprises les humains.

Ça n’est pas une question… elle a cerné Ursula. Elle les considère comme des choses faibles, fragiles et bêtes à bouffer du foin.

-SOUPER !

 

Ursula ôte son manteau et Ilona rage en voyant son corps parfaitement proportionné, moulé dans un top noir. Cette louve ne semble ni dégingandée ni mal à l’aise dans son grand corps.

Jalousie, jalousie…

 

La grande louve fait sensation en pénétrant dans la salle à manger. Elle dépasse le père d’Ilona d’une bonne tête. Jenna se redresse sur sa chaise, le cadet ouvre de grands yeux et l’aînée retient un mouvement de recul.

-Je suis navrée de m’incruster…

-Non! C’est un plaisir de connaître les amis de nos enfants. Installe-toi à côté de Ben.

 

Ce dernier a la bouche un peu ouverte.

Ursula s’attaque au poulet préparé par madame Simmons et mange de bon coeur. Les autres se mettent à raconter leur journée, tentant de ne pas dévisager l’invitée comme une curiosité touristique :

-Tu te rends compte que Lola m’a demandé pourquoi je ne sors avec personne ! se plaint Jenna. Non mais franchement, quelle idiote !

-Bah… pourquoi ? interroge Ursula, mettant bien les pieds dans le plat.

 

Ilona serre les lèvres; et c’est repartiiiiiii. La complainte de la cadette « lourdingue-et-inconsolable » sur le petit copain disparu.

-Tu vois Nolwenn… mon petit ami a été enlevé le jour d’Halloween. Il y avait son sang sur la moquette de l’entrée.

-Ça a mis une semaine à partir, marmonne Ilona.

-Il a sûrement été victime d’un enlèvement, gémit la cadette en enfouissant son visage dans ses mains. Oh mon dieu! Pauvre, pauvre Steve!

-Moi je me suis fait assommer, tout le monde s’en fout apparemment.

-Le monde ne tourne pas autour de toi Ilona ! s’écrie sa sœur.

 

Ilona en a le souffle coupé. Quoiquoiquoi ? Elle égoïste ? Sa soeur n’inversait pas un peu les rôles ?

-Tu penses pas que ton mec s’est fait la malle ?

Ilona éprouve un soudain élan de sympathie pour la louve.

-Attends, fait Ursula en fronçant les sourcils. Il s’appelle Steve ?

-Ouais. Et?

 

Le regard de la louve-garou devient pensif, tandis qu’elle coule un regard vers Ilona. A-t-elle déjà croisé le jeune loup ? Nathan lui a-t-il raconté quelque chose sur son compte ? Car Steve a créé des problèmes en refusant de se rendre à Yukon pour suivre sa formation et Nathan a dû venir le chercher par la peau des fesses.

 

Enfin, il l’a poignardé et ficelé comme un saucisson pour pouvoir ensuite le kidnapper.

-Nolwenn, ton appétit fait plaisir à voir! rigola la mère en voyant la louve saucer le plat. Mes filles veulent toutes ressembler à des mannequins, ha ha ha!

-Ah ouais Ilo? ricane la goinfre en se léchant le pouce. Moi j’ai toujours une faim de loup ! Tu fais un régime pour plaire à ton petit copain peut-être ?

-J’en ai pas, nie l’autre.

-Tu dis que c’est un pote, mais personne n’est dupe, fait Jenna. Tu as traîné deux jours avec la semaine passée !

-Il n’empêche que c’est mon ami.

-Tu n’oses même pas nous le présenter.

-Il ne veut voir personne. Et si je mange peu, c’est parce que je n’ai pas faim.

Depuis une semaine elle pouvait se contenter d’un repas par jour, sinon elle avait une sensation d’écoeurement qui ne la quittait plus.

-Fais attention à ne pas perdre encore plus. Tu as presque l’air malade, s’inquiète sa mère.

 

Ilona pose sa fourchette et monte dans sa chambre avec Ursula.

-Ai-je gaffé avec Nathan ? Tu n’as pas parlé de lui avec ta famille ?

-Il ne le souhaitait pas.

-Ah ? Et tu lui obéis ?

-Je pense avant tout à son anonymat. Puis mon dernier petit copain voulait aussi garder notre relation secrète alors j’ai l’habitude.

-Steve. Nathan m’a parlé de ton ex, il le déteste. Mais comment se fait-il que ta soeur soit sortie avec ? Je n’ai pas tout suivi.

-Il était avec nous deux en même temps, sauf que nous n’étions pas au courant. Je m’en suis rendu compte après avoir rompu. J’ai renoncé à en parler à Jenna, c’est qu’une gamine écervelée.

Ursula semble songeuse.

-C’est une garce ouais.

 

Ilona s’assied sur son lit, à côté de l’immense louve, pour qui tout paraît simple dans la vie.

-T’as bien cerné le personnage, ouais.

-Tu sais que même avant de t’avoir rencontrée, Nathan me saoulait avec sa nouvelle petite copine ?

-Comment ça?

-Je pensais que c’était une louve. D’habitude il n’en parle pas, et elles se succèdent rapidement. Mais là il me vantait ton courage et le fait que tu lui tiennes tête.

-Vraiment ?

-Ne m’oblige pas à te le dire deux fois…

-On dirait pourtant qu’il me considère comme une quantité négligeable. Il me donne rarement de ses nouvelles.

-Sérieux ? T’as son numéro ? Il le donne jamais. (Ilona ouvre de grands yeux, étonnée.) Tu comptes pour lui, tu passes avant son boulot – ça m’agace d’ailleurs – ce qui n’est jamais arrivé non plus. Il a réellement paniqué quand il t’a vue prisonnière du vampire.

 

Ilona sourit, ravie d’entendre un des proches de son amoureux lui dire de telles choses, malheureusement Ursula n’a pas fini.

-Je vois pourtant que tu ne mesures pas l’étendue de la force d’un loup-garou. Quand nous commettons un meurtre, il est difficile de ne pas céder à l’odeur du sang et de se précipiter sur une autre victime pas loin pour la liquider.

 

C’était pour ça qu’après avoir poignardé Steve, Nathan s’est mis à traquer Ilona dans la rue pour la plaquer contre un mur? En réalité il a, l’espace d’une seconde, essayé de la…

-Il voulait me tuer.

-Quoi ?

-La première fois que je l’ai rencontré, il a failli me trucider, après avoir blessé mon ex avec une arme.

-Oh.

Silence embarrassé, ni l’une ni l’autre ne sait quoi dire. Ursula se demande à présent si Ilona n’est pas un peu dérangée et se promet de ne pas trop lui faire confiance. Quel genre de nana est capable de sortir avec un mec qui a tenté de la tuer !?

 

Elles vont se doucher tour à tour et s’endorment sans plus parler.

Mais dès que le souffle de Ursula devient plus léger, qu’un discret ronflement s’élève de ses lèvres et que toute la maisonnée est enfin silencieuse, Ilona ouvre les yeux.

 

Elle se lève, en short et en top, les cheveux attachés en une queue de cheval lâche et les pieds nus. Elle ouvre son placard, enlève une des planches au sol grâce à un stylo et en sort un long imperméable noir taché et des baskets de la même couleur, qu’elle enfile.

Elle entrouvre la porte et descend les escaliers sur la pointe des pieds avec une discrétion absolue. Elle sort dans le froid après avoir ouvert la porte puis s’en va. Elle court de rue en rue, puis arrive au centre-ville en trois minutes, alors qu’elle n’y parvient qu’en vingt pendant la journée.

 

Elle s’immobilise au coin d’une rue, guettant qui elle va pouvoir attaquer. Elle attend, accroupie, pendant près d’une demi-heure, pour enfin voir une femme d’une trentaine d’années sortir d’un bar, saoule.

 

Elle ne bouge pas, le coeur accélérant à l’idée du goût du sang de l’autre dans sa bouche. Sa peau ferme, son pouls lent et ce liquide chaud, circulant dans tout son système sanguin…

Quand elle dépasse Ilona, la femme n’a aucune chance : se redressant sans bruit, bondissant comme un diable hors de sa boîte, la jeune blonde la renverse et la plaque au sol avec une force surhumaine et plonge deux canines effilées dans sa gorge. La femme ne peut hurler, car la main d’Ilona la bâillonne.

 

En deux minutes à peine, tout le sang est drainé. Ilona contemple son manteau et ses mains humides et sales. Merde, le soleil se lève dans un quart d’heure et il faut encore qu’elle se lave. Elle abandonne le cadavre à même le trottoir sans même un regard en arrière.

 

Retourner à la maison lui prend cinq minutes. Elle cache ses vêtements souillés sous les planches du placard et, jurant secrètement à cause de la louve qui a mis trois plombes à s’endormir et qui va se réveiller d’ici pas longtemps, s’enferme dans la salle de bain. Elle lave ses mains au savon doux, mais frotte vigoureusement, provoquant des rougeurs sur sa peau. Elle se rince dix fois le visage en quatrième vitesse. Elle crème son corps pour couvrir toute odeur de sang et s’enfile sous les couvertures avant que Ursula n’ouvre les yeux.